Très rare : une préfecture française dont le cimetière donne l’impression d’être à la campagne.
À Mende, l’enclos funéraire Saint-Gervais domine la cité (pour l’anecdote, les amateurs de cyclisme reconnaîtront ici la route du Causse qui vit Laurent Jalabert en 1995 remporter une de ses plus belles victoires dans le Tour de France) et sa cathédrale aux clochers asymétriques ; il n’est guère étendu mais dense et peuplé de tombeaux anciens qui en renforcent l’aspect immuable.
Sa superbe porte franchie (l’inscription Omnes Resurgemus signifiant, bien sûr « Nous ressusciterons tous »), on y voit l’abside de la vénérable église Saint-Gervais, pillée et incendiée au XVIè siècle par les huguenots.
Aucune célébrité d’envergure nationale mais plusieurs figures lozériennes. L’amateur consacrera trente minutes à découvrir l’endroit, le passionné, beaucoup plus.
Comme dans d’autres régions de France, il est souvent fait mention sur les tombes de la profession du défunt.
Balmelle Marius (1892-1969), historien et archéologue, auteur de plusieurs ouvrages sur Mende, la Lozère et le Gévaudan. Inhumé avec son épouse, Sabine (1893-1968). Deux médaillons, signés Bernard Laborie, restituent leurs visages.
Bonnefoux Camille-Adolphe, dompteur de fauves. Sa fille, Marie (+ 1954 à 91 ans), qui ne repose pas ici, épousa Ahmed Ben Amar et créa avec lui le cirque Amar.
Bourrillon Henri (1891-1945), avocat, élu maire de Mende en 1929, destitué en 1941 par le régime de Vichy. Chef de la Résistance en Lozère, il fut déporté et mourut d’épuisement (décédé en déportation le 5 mai 1945 au cours d’une marche de la mort, consécutive à l’évacuation du camp de Flossenburg-Floha) quelques jours avant la libération des camps. Sa dépouille fut rapatriée ici en 1952. Un monument lui est dédié dans le centre de Mende.
Daudé-Gleize Paulin (1862-1928), député de la Lozère de 1898 à 1906 puis sénateur de Lozère de 1906 à sa mort, enfin maire de Mende de 1919 à sa mort.
Delmas Philippe (+ 1911, à 32 ans), avocat et diplomate. Son épitaphe vaut d’être citée :
La mort
C’est le berceau de l’espérance
C’est la fleur qui s »épanouit
C’est le terme de la souffrance
C’st le soleil après la nuit
C’est le but auquel tout aspire
C’est après les pleurs le sourire
C’est le retour après l’adieu
C’est l’affranchissement suprême
C’est rejoindre tous ceux qu’on aime
C’est l’immortalité, c’est Dieu.
Jaffard François Justin (1791-1854), avocat, député de la Lozère de 1849 à 1851 (Esprit élevé, ami franc et dévoué, caractère indépendant il fut aimé des siens et estimé de tous).
Jourdan Louis (1843-1932), préfet de la Lozère de 1879 à 1881, maire de Mende de 1884 à 1888, député de la Lozère de 1886 à 1905. Il se consacra aussi à la poésie régionaliste.
Laget Jules (1864-1949), avocat, président du Conseil général de laLozère, maire d’Ispagnac de 1896 à 1904 puis de 1912 à sa mort. Avec lui repose son gendre, Roger Barbot (1905-1995) qui lui succéda comme maire d’Ispagnac (1949-1964).
Ligonnès Marie Sophie (de) (+ 1863), soeur d’Alphonse de Lamartine.
Mély Pierre (+ 1863), tisserand. Sa carrière fut illustrée des progrès qu’il fit dans l’industrie du tissage. Sur sa tombe est reproduite la médaille d’honneur reçue à Paris en 1819.
Ce cimetière de Mende est aussi riche en sépultures de congrégations religieuses :
Tombeau collectif des religieuses de la Sainte-Famille.
Tombeau collectif des Soeurs Trinitaires, servantes des pauvres de l’hôpital de Mende.
Tombeau collectif des Soeurs de l’Union chrétienne, servantes du Sacré-Coeur.
Ne pas manquer le beau papillon qui décore le sarcophage sous lequel dort la petite Marie-Mathilde Borelli de Serres (1828-1830).
J’ai déchiffré ces mots sur la tombe de Jeanne Maurin (1902-1919) :
C’était à ma seizième année
Que Dieu m’enleva de vos bras !
Il prend toujours la moins fanée
Quand il touche aux fleurs d’ici-bas.
Enfin, un prénom pour le moins original, relevé sur la tombe d’un prêtre : Frézal (saint Frézal fut évêque de Mende au IXè siècle).