Situé au nord de la ville, le grand cimetière de Nevers se révèle paradoxal. Il porte le nom d’un sculpteur morvandeau qui n’y repose pas (Jean Gautherin est inhumé à Paris, au cimetière Montparnasse) et, malgré de louables efforts (fléchage de la sépulture de Pierre Bérégovoy, informations claires à la Conservation), dévoile de surprenants initiatives (pourquoi cet abri à poubelle précisément fixé devant deux vieux obélisques du XIXè siècle alors que la place ne manque pas à côté ?) et exhale une infinie tristesse.

Très peu arboré, hormis près de l’entrée, sa visite est pénible sous la chaleur; quant à ses allées sableuses, elles découragent de l’arpenter les jours de forte pluie (je témoigne en connaissance de cause pour l’avoir vu par tous les temps).

Enfin, nombre de monuments qui durent jadis être superbes s’avouent désormais vaincus.

 

 

Néanmoins, il a donné asile, outre à un ancien Premier ministre, à de nombreuses célébrités locales. Voici celles qui ont retenu mon attention (la liste ci-dessous ne revendique, bien sûr, aucune exhaustivité) :

Badouix Barthélemy (1784-1840), administrateur. Préfet de la Nièvre de 1831 à 1840, il fit creuser des canaux qui désenclavèrent le Morvan en le reliant à la vallée de la Loire. Sa pyramide est un des monuments imposants du cimetière. Épitaphe : À l’administrateur dévoué au pays.

 

 

Barat Jean-Claude (+ 1855, à 68 ans), capitaine d’Empire, blessé à la bataille de Wagram.

Bérégovoy Pierre (1925-1993). L’émotion provoquée par l’annonce de son suicide, dont les circonstances n’ont jamais été clairement établies, le 1er mai 1993 sur la berge du canal de la Jonction, à Nevers, quelques semaines après la défaite socialiste aux législatives, a quelque peu éclipsé son parcours politique : ouvrier ajusteur devenu secrétaire de la présidence de la République (1981-1982), maire de Nevers (1983-1993), député de la Nièvre (1986-1993), ministre des Affaires sociales (1982-1984) puis de l’Économie et des Finances (1984-1986 puis 1988-1992), enfin Premier ministre (1992-1993), succédant à Édith Cresson.
Sa dalle de pierre brute est proche de l’entrée et fléchée, au au milieu de la seule allée bordée d’arbres.

 

Avec lui repose son épouse, Gilberte Bérégovoy (1920-2001). Il est devenu, hélas, très difficile de déchiffrer les mots gravés en guise d’épitaphe : Parti ? Vers où ? Parti de mon regard, c’est tout. Sur le lieu du drame, au bord du canal, une stèle a été érigée dont les caractères s’effacent déjà.

 

 

Une bordure gazonnée, un banc et deux stèles destinées à recevoir les différents hommages complètent la sépulture.

Beyl Jean (1926-2008), industriel, inventeur de la fixation de ski moderne, baptisée Look. Il fonda et présida la société du même nom avant de la céder au groupe de Bernard Tapie en 1982.

 

Bouveault Adolphe (1834-1892), peintre et architecte.

Crosnier Auguste-Joseph (1804-1880), vicaire général et historien.

Dagain Léon (1896-1958), homme politique et syndicaliste. Commis des PTT, il fut député (SFIO) de la Nièvre de 1945 à 1958 et joua un rôle de médiation important lors des grèves de 1946. Un médaillon orne sa stèle.

Dard d’Espinay Louis-Gaspard (1753-1808), général de brigade. Il fut maire de Nevers.

Dautancourt Pierre (1771-1832), général d’Empire. L’épitaphe gravée sur son tombeau (élevé par la Garde Nationale) en forme d’obélisque apprend qu’il fut Soldat volontaire au bataillon de Vervins en 1793, Colonel-major des Lanciers polonais en 1807, Général de brigade sur le champ de bataille à Hanau (…) et qu’il combattit à Ulm, Austerlitz, Somosierra, Smolensk, Moskowa, Brienne, Montereau. Ajoutons qu’il fut un de ceux qui arrêtèrent le duc d’Enghien et assistèrent à son exécution. Son patronyme est parfois écrit d’Autancourt.

Laborde (famille). Chapelle extraordinaire mêlant pierre de Volvic, dôme et clochetons byzantins. Oeuvre de l’architecte Massillon-Rouvet (qui travailla avec Viollet-le-Duc), elle est malheureusement fort décrépite.

La Roche Fontenilles Auguste-Pierre (de) (1779-1856), officier d’Empire, aide de camp du général Grouchy.

Laurent Eugène (1863-1933), homme politique. Député socialiste de la Nièvre de 1914 à 1919. Stèle avec médaillon.

Lefèbre Albert (1857-1905), médecin-chef de l’hôpital de Nevers. Médaillon.

Locquin Jean (1879-1949), tout à la fois avocat, historien d’art et homme politique. Député socialiste de la Nièvre de 1914 à 1932, il présida le Conseil général de 1924 à 1929 et fut maire de Nevers de 1939 à 1941 mais destitué par les autorités de Vichy.

Manuel Jacques André (1791-1857), banquier et homme politique. Ce pur Nivernais eut un riche itinéraire : après avoir participé aux dernières campagnes de l’Empire, il fut adversaire libéral de la Restauration, député de la Nièvre sous la monarchie de Juillet (1839-1848), d’abord modéré puis dans l’opposition, avant de finir sénateur (1852-1857) rallié au Second Empire.

Pelecier Claude-Joseph (1774-1855), colonel d’Empire.

Ponsin Zélia (1843-1885), comédienne, sociétaire de la Comédie-Française de 1860 à 1880.

Potocki Xavier (+ 1842, à 30 ans), sous-lieutenant du 7è régiment de Lanciers polonais.

Sallé Lucette (1900-1945), résistante et déportée. Épitaphe : Morte à son retour du camp de Ravensbrück après 11 mois de famine et d’épouvante.

Tillier Claude (1801-1844), écrivain. De son oeuvre émerge un roman, mais quel roman ! (beaucoup en ont fait un livre de chevet dont Georges Brassens qui le plaçait très haut dans ses admirations), Mon Oncle Benjamin. La version cinématographique, signée Édouard Molinaro, réunit Jacques Brel, Claude Jade et Paul Frankeur (ce dernier également inhumé dans la Nièvre, à Chitry-les-Mines).

Valmont Jean (de) (1907-1989), historien de Nevers et du Nivernais.

Vistelle Léonard (+ 1854, à 42 ans), chaudronnier, sous un obélisque orné de ses outils.

Au plan religieux, un caveau coiffé d’une croix indique la sépulture commune des Pères Maristes.

Le cimetière compte un important carré militaire français où les croix s’alignent sous la vigilance du drapeau tricolore mais aussi un carré militaire allemand où reposent 117 soldats tombés durant la Première Guerre mondiale.

Un soldat inconnu de la guerre 1914-1918 repose, lui, dans une concession offerte par la famille Grincour.

Une stèle rend hommage au colonel de la Légion étrangère Pierre Jeanpierre (1912-1958), mort pendant la guerre d’Algérie, ainsi qu’aux légionnaires, aux parachutistes, à tous ceux qui sont morts pour que vive la France. Le colonel Jeanpierre est inhumé dans le carré de la Légion étrangère du cimetière de Puyloubier (Bouches-du-Rhône).

On signalera, enfin, les belles chapelles funéraires des familles Bernot, Boutroux, Dalette, Dechartre, Regnier-Savaresse ou Trechot-Vignal et, pour adoucir cette déambulation souvent austère, la jolie stèle ouvragée (pleureuse, guirlande de roses de marbre blanc et photo de la disparue) de la jeune Renée Robin (1906-1934) ainsi que la staue implorante qui veille la cendre d’Anne-Marie Coulot, morte à 19 ans.

 

Adresse :
29 rue Jean-Gautherin.

Horaires :
Du 2 novembre au 31 mars : de 9h à 17h.
Du 1er avril au 29 octobre : de 9h à 19h15.
Pour les Rameaux et les fêtes de la Toussaint, la veille et l’avant-veille : de 8h à 18h.