Après le cimetière de Sievering et la Michaelerkirche, nouvel hommage aux morts viennois avec un des plus ravissants cimetières de la capitale autrichienne, celui d’Ober-Sankt Veit, ouvert en 1876 en remplacement d’anciens cimetières paroissiaux, et situé à l’ouest de la ville.
Ne pas se fier à son portail banal, l’endroit est une merveille à dimension humaine (3,5 hectares, environ 4500 sépultures, rien à voir avec les 240 hectares du Cimetière central !), un enclos boisé, pentu et abritant la tombe d’un des plus grands peintres du XXè siècle naissant.
Les amateurs d’art funéraire s’y réjouiront :
Ne surtout pas quitter l’endroit sans être allé au sommet où sont groupés plusieurs mausolées familiaux et d’où se dévoile un large panorama sur la ville.
La sépulture la plus recherchée se trouve toutefois dans la partie basse, à droite de l’entrée, précisément dans la section B : celle du peintre expressionniste Egon SCHIELE (1890-1918) dont l’oeuvre violente, tourmentée, agressive, et profondément érotique, vient de traverser un siècle sans rien perdre de sa modernité.
Après avoir quitté l’académie des Beaux-Arts de Vienne dont il jugeait l’enseignement trop conservateur, il avait fondé avec d’autres jeunes artistes le Neukunstgruppe (groupe du Nouvel art) et, en moins de dix années, laissé trois cents peintures et dix fois plus de dessins, traversant en météore une vie semée de scandales (emprisonné pour exposition de documents pornographiques, soupçons de détournement de mineurs puis de relation adultère avec la soeur de sa femme).
Il mourut de la grippe espagnole le 31 octobre 1918 (quelques mois après son maître spirituel Gustav Klimt, inhumé au cimetière d’Hietzing que je recommande de visiter avant ou après celui d’Ober-Sankt Viet dont il n’est guère éloigné).
Il repose avec sa femme, Edith (née HARMS) (1893-1918) décédée trois jours avant lui.
Elle était enceinte de six mois et sa future paternité avait inspiré à Schiele son ultime tableau, La Famille, exposé au musée du Belvédère.
Tous deux sont représentés sur la stèle que la végétation avait envahie lors de ma visite.
Les autres occupants célèbres du cimetière sont (liste, évidemment, non exhaustive) :
Kurt BENESCH (1926-2008), écrivain.
Friedrich Julius BIEBER (1873-1924), explorateur de l’Afrique et ethnographe.
Hilde BORIK (1908-2007), femme politique.
Ludwig BOWITSCH (1818-1881), écrivain et poète.
Conrad BÜHLMAYER (1835-1883), peintre.
Hans CHRISTIAN (1929-2011), chanteur lyrique (baryton).
Michael DANZINGER (1914-2007), compositeur et pianiste.
Heinrich GATTERMEYER (1923-2018), compositeur.
Carl GEYLING (1814-1880), peintre, créateur de la plus ancienne fabrique autrichienne de vitraux.
Christl GOLTZ (1912-2008), chanteuse lyrique.
Guido GRÖGER (1874-1950), entrepreneur en bâtiment.Vienne lui doit, entre autres, l’église paroissiale d’Alt Ottakring.
Herbert GRUBER (1913-1999), producteur de cinéma.
Ludwig HERBERTH (1890-1953), homme politique.
Helmut HEUBERGER (1927-2001), peintre et dessinateur.
Adolf HOLZHAUSEN (1868-1931), éditeur et libraire.
Paul HÖR (1948-2011), comédien.
Ewald KLEISINGER (1912-2000), juriste et résistant, Juste parmi les nations.
Anton KOLM (1865-1922), photographe devenu l’un des premiers réalisateurs de l’histoire du cinéma autrichien. Inhumé avec son épouse, Luise FLECK (née Veltée) (1873-1950), réalisatrice, seconde femme de l’Histoire du cinéma à avoir signé des films (la première étant la Française Alice Guy-Blaché, inhumée aux États-Unis). Veuve, cette dernière se remaria avec le collaborateur de son mari, le réalisateur et producteur Jacob FLECK (1881-1953) qui repose avec eux. Autre occupant de cette sépulture chère à tous les cinéphiles viennois, le fils d’Anton Kolm et Luise Fleck, Walter KOLM-VELTÉE (1910-1999), réalisateur.
Leur stèle évoque une pellicule cinématographique.
Robert KRASSER (1882-1958), homme politique.
Walther KRAUS (1902-1997), philologue.
Karl KŘITEK (1861-1928), général austro-hongrois ayant combattu pendant la Première Guerre mondiale.
Erich LIFKA (1924-2007), journaliste et écrivain.
Otto MAZAL (1932-2008), professeur d’études byzantines.
Erwin MELICHAR (1913-2000), juriste, président de la Cour constitutionnelle autrichienne de 1977 à 1983.
Alexander MELL (1850-1931), pédagogue pour aveugles.
Alfred MELL (1880-1962), juriste et historien. Fils du précédent.
Alma MOTZKO (1887-1968), historienne et femme politique.
Otto PAMMER (1926-2008), documentariste et producteur.
Anton PESCHKA Jun. (1914-1997), peintre, neveu d’Egon Schiele.
Pius Michael PRUTSCHER (1913-1995), homme politique.
Roland RAINER (1910-2004), architecte, concepteur de la Wiener Stadthalle.
Kurt RAPF (1922-2007), compositeur et organiste.
Helmut RICHTER (1941-2014), architecte, concepteur de la Königseder Haus à Baumgartenberg.
Theodor SCHENK (1907-1967), compositeur et pédagogue. Christel GOLTZ (voir plus haut) fut son élève.
Gabriele SIMA (1955-2016), chanteuse lyrique.
Rudolf von SLATIN (1857-1932), explorateur et officier, gouverneur du Soudan turco-égyptien.
Leopold SOMMERER (1819-1875), professeur et conseiller municipal.
Ignaz SPÖTTL (1834-1892), numismate et historien d’art.
Oswald STIMM (1923-2014), sculpteur.
Otto STOESSL (1875-1936), écrivain.
Felix TARBUK (1893-1982), ingénieur ferroviaire devenu officier de la Wehrmacht.
Karl WÜSTENHAGEN (1893-1950), comédien, metteur en scène et directeur de théâtre, zélateur du régime nazi.
Adresse :
Gemeindeberggasse.
Horaires :
du 3 novembre à fin février : 8h – 17h.
du 1er au 31 mars et du 1er octobre au 2 novembre : 7h – 18h.
du 1er avril au 30 septembre : 7h – 19h.
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