Le cimetière de Lunel, situé près du centre de la ville, derrière les arènes, abrite plusieurs personnalités fort différentes les unes des autres : un maître du cinéma muet, l’arrière-petit-fils de Victor Hugo, un académicien, ainsi que des figures locales. Propre et clair, tenu par un personnel au service du public, il permet d’en apprendre beaucoup sur cette cité taurine.

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Henri de Bornier (1825-1901), auteur dramatique (La Fille de Roland), membre de l’Académie française (Edmond Rostand lui succéda et prononça donc son éloge). Il était aussi administrateur de la Bibliothèque de l’Arsenal. Sa chapelle de famille se trouve dans l’allée centrale du cimetière.

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Dombras Jean (1924-2007), résistant. Il raconta son parcours dans un livre autobiographique, L’Odyssée du 31127. Sa tombe, ornée de sa photo, rappelle les étapes douloureuses de son itinéraire : Compiègne, Neuengamme, Brunswick, Ravensbruck.

Feuillade Louis (1873-1925), réalisateur, un des plus grands noms du cinéma muet qui tourna des centaines de films entre 1907 et 1925 dont les fameuses séries Fantômas, Judex ou Les Vampires (avec Musidora, inhumée à Bois-le-Roi, en Seine-et-Marne). Il avait aussi été le scénariste d’Alice Guy. Tombe dans une allée perpendiculaire à l’allée centrale, côté gauche, en partant de l’entrée.

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Hugo Jean (1894-1984), arrière-petit-fils de Victor Hugo. Il fut peintre, décorateur mais aussi écrivain et connut le Tout-Paris artistique de l’entre-deux-guerres et des années 50, en particulier Jean Cocteau, Max Jacob, Pablo Picasso, Marie-Laure de Noailles. Avec lui reposent, entre autres, sa mère, Pauline Ménard (1870-1941) (voir plus bas), sa soeur, Marguerite Hugo (1898-1984), sa seconde épouse, Lauretta, née Hope-Nicholson (1919-2005), peintre. Deux simples plaques à même le sol les signalent à l’attention (près de la petite entrée; depuis le portail principal, se diriger vers le fond et tourner à gauche avant le carré militaire).

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Ménard Joseph (1859-1911), avocat et homme politique qui défendit les actionnaires spoliés dans le scandale de Panama et fut député de Paris. Il était le frère de Marie-Charles Ménard (voir ci-dessous). Tombeau coiffé d’une croix contre le mur de droite (avant la zone moderne du cimetière).

Ménard Marie-Charles (1861-1892), héros de l’histoire coloniale. Frère de Joseph Ménard (voir ci-dessus), ce capitaine d’infanterie de marine fut tué au Soudan occidental (sur le territoire de l’actuelle Côte-d’Ivoire) par des indigènes en guerre contre la présence française. Une statue lui est dédiée à Lunel. Ses restes ne furent rapatriés qu’en 1992, à l’occasion du centenaire de sa mort, et inhumés dans une tombe du carré militaire lors d’une importante cérémonie. Depuis l’entrée principale, le carré militaire est situé au fond, à gauche.

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Ménard Pauline (1870-1941), femme de lettres. Petite-fille de Pierre-Frédéric Dorian (inhumé au Père-Lachaise), ministre des Travaux publics dans le gouvernement de Défense nationale, épouse de Georges Hugo (inhumé aussi au Père-Lachaise), petit-fils de Victor Hugo, elle tint un salon que fréquentèrent Zola et Proust. Près d’elle est inhumé son fils, Jean Hugo (voir plus haut).

San Juan Francis (+ 1966), raseteur (champion de course camarguaise), membre de ce que les spécialistes appellent le « Carré d’as », quatuor mythique des années 50 et 60. Il mourut accidentellement. Les arènes de Lunel portent son nom. Arthur, son père, mourut en 2010, à l’âge de 103 ans.

Ne pas quitter le lieu sans voir également le monument érigé à la mémoire des pasteurs Louis Bazille (+ 1853, à 64 ans) et Gustave Bazille (+ 1897, à 72 ans) qui accomplirent des ministères de respectivement 37 et 43 années.
J’ai aussi remarqué plusieurs plaques funéraires portant le nom et l’emblème du club taurin local « La Cocarde », la grande chapelle gitane (impeccablement entretenue) de la famille Amador, la stèle ornée de coquillages de la famille Barcelo, le monument ouvragé d’Abraham Coulondre, le décor macabre du tombeau Gautier-Dupin et l’épitaphe Hodie mini cars tibi (« Aujourd’hui, mon tour, demain, le tien »), le beau et vieux sépulcre Guiraud-Delfour.

Autre touche insolite : à l’entrée, le « Caveau des libres-penseurs« .

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Peu d’arbres ici mais un palmier qui fournit l’indispensable note méridionale.

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Sur la tombe d’un homme mort en 1990, j’ai enfin relevé : Te voilà parti pour ton grand voyage mais l’épitaphe la plus marquante n’incite guère à l’espérance :

Douleurs
Toujours douleurs
Telle est la vie