La célébrité locale est le poète Francis Jammes (1868-1938), natif du département voisin des Hautes-Pyrénées. Chantre des humbles, incarnation de l’homme de lettres provincial, il devint à partir de 1905 un catholique fervent qui ne retrouva jamais l’inspiration sensuelle de ses premiers écrits. Son portrait, avec béret et longue barbe blanche, figurait jadis dans les manuels scolaires où les instituteurs trouvaient matière à dictées et récitations.
De son oeuvre prolifique ne subsistent plus guère aujourd’hui que quelques strophes du poème Rosaire, extrait du recueil Clairières dans le ciel, mises en musique et chantées par Georges Brassens sous le titre La Prière :
Par le petit garçon qui meurt près de sa mère
Tandis que des enfants s’amusent au parterre ;
Et par l’oiseau blessé qui ne sait pas comment
Son aile tout à coup s’ensanglante et descend
Par la soif et la faim et le délire ardent :
Je vous salue, Marie.
(…)
Par la mère apprenant que son fils est guéri,
Par l’oiseau rappelant l’oiseau tombé du nid,
Par l’herbe qui a soif et recueile l’ondée,
Par le baiser perdu, par l’amour redonné,
Et par le mendiant retrouvant sa monnaie :
Je vous salue, Marie.
Bien oubliés le succès rencontré en 1898 avec De l’Angélus de l’aube à l’Angélus du soir, ses liens avec Gide ou Claudel, l’admiration que lui témoignèrent Rilke et Kafka.
Il y a quelques années, à la télévision, un chanteur fort populaire qui allait chanter La Prière en hommage à Brassens précisa avec justesse qui était l’auteur des paroles mais crut bon de prononcer le patronyme « Jammes » à l’américaine (« Djemms ») sans être repris ni par l’animateur ni par aucun des invités présents. Sic transit.
Dans son testament, le poète avait désamorcé toute velléité de grandiloquence posthume :
Aucun discours sur ma tombe.
Sur la même pierre banale qui, dans un coin du cimetière de Hasparren, épouse l’ombre du sauvage Ursuïa, où les brebis paissent l’herbe sous les épines, que l’on grave mon nom suivi de ce simple titre Poète et des dates de ma naissance et de ma mort.
(l’Ursuïa est le massif montagneux qui domine Hasparren).