Au milieu des champs, voici un cimetière de village loin d’être saturé. De forme triangulaire, il regroupe l’essentiel de ses sépultures le long de ses murs laissant une vaste pelouse centrale non encore lotie. Le calme y est absolu.
Un monument aux morts, une croix centrale, quelques vieux tombeaux en décrépitude, deux chapelles familiales résumeraient l’endroit s’il n’abritait en plus la sépulture d’un des grands comédiens du XXè siècle.
Au fond, à droite, se trouve en effet, enfouie sous le lierre, la tombe d’ Alain Cuny (1908-1994). Serviteur des grands textes, il imposa sa stature et sa voix (l’écouter dire Artaud ou Claudel pour comprendre ce qu’est l’aristocratique soumission du comédien) au théâtre comme au cinéma (avec un éclectisme allant des Visiteurs du soir et La dolce vita à Emmanuelle, et cette belle sentence à propos de ce dernier film : J’ai tourné Emmanuelle pour me débarrasser de l’estime des gens que je n’estimais pas.
L’homme avait du caractère, en témoigne la gifle qu’il adressa à Dario Moreno au Festival de Cannes 1960 (il reprochait au chanteur de n’être qu’un pitre et un poisson visqueux alors qu’on venait de conspuer le film d’Antonioni, L’avventura) dont il fut aussitôt exclu, et de l’énergie (il devint réalisateur à plus de quatre-vingts ans en signant L’Annonce faite à Marie, ultime hommage à Claudel). Il acheva ses jours dans sa maison de Civry-la-Forêt.
Ne pas quitter la région sans aller jusqu’au village voisin d’Orvilliers où repose le président de la République Georges Pompidou.