Le metteur en scène André Barsacq (mort en 1973 et inhumé à Paris, au cimetière des Batignolles), trouvant à ses débuts son patronyme imprononçable et trop difficile à mémoriser pour le public, lui avait conseillé de le remplacer par son second prénom et de devenir Niels Philippe. Il avait refusé pour ne pas faire de peine à ses parents dont il était l’enfant unique. Fils d’un couple modeste, père danois qui avait fui son pays en 1943 lors de l’invasion allemande et mère bretonne, Niels Arestrup (1949-2024) n’était pas homme à faire des concessions.
Il imposa son nom, son regard d’acier, sa carrure, son allure inquiétante autant que fiévreuse et durant cinquante ans ne quitta plus les écrans ni les planches, jouant au théâtre aussi bien Molière, Racine, Tchekhov, Rilke, Pirandello ou Marguerite Duras qu’Éric-Emmanuel Schmitt, Nicolas Bedos ou, pour sa dernière apparition en 2022, son épouse et mère de ses enfants, la dramaturge Isabelle Le Nouvel. Il reçut en 2020 le Molière du comédien dans un spectacle de théâtre privé pour Rouge de John Logan. Au cinéma, il est à ce jour le seul détenteur de trois César du meilleur acteur dans un second rôle pour, successivement, De battre mon cœur s’est arrêté (2006), Un prophète (2010) et Quai d’Orsay (2014). À la télévision, il incarna, entre autres, Rastignac (Les secrets de la princesse de Cadignan, réalisé par Jacques Deray en 1982), Danton (Manon Roland, signé Édouard Molinaro en 1989) mais aussi, plus récemment, Francis Laugier dans la première saison de la série Baron noir (2016).
Partenaire caractériel, ses accès de violence envers les actrices (Maria Schneider, Miou-Miou, Isabelle Adjani, Myriam Boyer) ternirent sa réputation. En 2001, il avait publié un livre dont le titre, Tous mes incendies (Plon), disait son impétuosité.
Niels Arestrup succomba le 1er décembre 2024 à une longue maladie et fut inhumé au cimetière de Ville-d’Avray (Hauts-de-Seine), sa commune de résidence. Sa tombe y côtoie celles de Boris Vian, Jean Rostand ou Marie Dubois mais également parce que Ville-d’Avray et Marnes-la-Coquette ont un champ de repos commun celles de Maurice Chevalier, Danielle Darrieux ou Christiane Minazzoli.
Depuis peu, un sobre monument a été installé. Sur la dalle, il y a quelques jours, des plantes, deux livres (Lettres à un jeune poète de Rilke, Mélancolie de la gloire d’Isabelle Le Nouvel), une statue de Bouddha ainsi qu’un petit drapeau danois.