Splendide désemparé que ce poète belfortain venu au monde en 1879 et qui, après avoir côtoyé dix métiers et cent misères, décida de le fuir à trente-quatre ans en plongeant dans la Marne, à Maisons-Alfort, après avoir avec méthode détruit ses manuscrits et sa correspondance. C’était un jour de juin 1913 mais on ignore lequel, peut-être dès le 4, ou encore le 6, voire le 10 ou même le 12. Les nécrologues pointilleux doivent composer avec ce mystère : lorsque le corps du malheureux fut repêché par des mariniers, il était impossible de savoir combien de temps il avait séjourné dans l’eau et l’acte de décès mentionna avec prudence comme date du geste fatal vers le 6 juin.
C’est sur intervention d’un autre écrivain, comme lui franc-comtois, Louis Pergaud que Deubel échappa à la fosse commune et bénéficia d’un lopin au cimetière parisien de Bagneux. Sort cruel : deux ans plus tard, le destin de Pergaud fut de disparaître, mort pour la France du côté de la Woëvre, et d’être sans doute pour jamais un défunt sans sépulture.

Pierre tombale de Léon Deubel

Pierre tombale de Léon Deubel

Aujourd’hui, 12 juin 2013, il n’y avait pas foule pour célébrer celui que les anthologies qui le mentionnent encore expédient comme le dernier des poètes maudits et c’est dans une solitude hélas attendue que je me suis rendu devant sa pierre tombale, porteuse de l’inscription Le poète Léon Deubel. Il me plaît de penser que ce sont de vigilants pergaldiens qui l’ont nettoyée il y a peu (elle n’avait guère cet aspect auparavant).

Ses dernières lignes

Pourtant, à l’occasion du centenaire de sa mort, lui dont certains textes avaient été mis en musique par son ami Edgar Varèse se retrouve l’inspirateur d’un opéra-rock bientôt créé en Franche-Comté ! Ainsi l’auteur du Chant des routes et des déroutes n’a pas sombré dans un total oubli. Sa voix plaintive s’entend encore décrivant le fil de ses jours comme une tranche de vie saignante à point et ce n’est pas une mauvaise nouvelle.

Pour en savoir plus :
http://www.estrepublicain.fr/actualite/2013/06/10/le-poete-maudit-et-le-rocker

Sépulture au cimetière parisien de Bagneux, 11è division, 18è ligne, 2è tombe (près du carrefour des divisions 10, 11, 17 et 18).

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