Né le 15 novembre 1936, Wolf BIERMANN est encore bien vivant et fête donc aujourd’hui ses 84 ans.

Chanteur (auteur-compositeur-interprète) né à Hambourg, fils d’un militant communiste anti-nazi assassiné à Auschwitz en 1943, installé à Berlin-Est dans les années cinquante mais considéré comme dissident après la construction du Mur (et même déchu de sa nationalité est-allemande en 1976) puis contraint de s’installer à l’Ouest (il eut alors ce mot fameux : Jetzt bin ich vom Regen in die Jauche gekommen, Je suis passé de la pluie au purin), il n’a cessé d’être une grande voix contestataire.

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De son oeuvre, j’extrais [cette chanson datée de 1979 où il raconte être venu, un jour d’hiver, en pèlerinage à Paris, au cimetière Montmartre, sur la tombe de Heinrich HEINE (1797-1856) dont le Troisième Reich brûla les livres en 1933 lors d’autodafés.->
https://www.youtube.com/watch?v=QXpNXCckx1A]

Texte et mélodie que j’avais découverts en 1982, à une époque où je n’imaginais guère que je me rendrais si souvent, et tant de fois accompagné par vous, sur la tombe de Heine…
J’espère que vous aurez plaisir à l’écouter et à en lire les paroles.

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AUF DEM FRIEDHOF AM MONTMARTRE

Auf dem Friedhof am Montmartre
Weint sich aus der Winterhimmel.
Und ich spring mit dünnen Schuhen
Über Pfützen, darin schwimmen
Kippen, die sich langsam öffnen
Kötel von Pariser Hunden
Und so hatt’ ich nasse Füße
Als ich Heines Grab gefunden.

Unter weißem Marmor frieren
Im Exil seine Gebeine
Mit ihm liegt da Frau Mathilde
Und so friert er nicht alleine.
Doch sie heisst nicht mehr Mathilde
Eingemeisselt in dem Steine
Steht da gross sein grosser Name
Und darunter bloss: Frau Heine.

Und im Kriege, als die Deutschen
An das Hakenkreuz die Seine-
Stadt genagelt hatten, störte
Sie der Name Henri Heine !
Und ich weiss nicht wie, ich weiss nur
Das: er wurde weggemacht
Und wurd wieder angeschrieben
Von Franzosen manche Nacht.

Auf dem Friedhof am Montmartre
Weint sich aus der Winterhimmel.
Und ich spring mit dünnen Schuhen
Über Pfützen, darin schwimmen
Kippen, die sich langsam öffnen
Kötel von Pariser Hunden
Und so hatt’ ich nasse Füße
Als ich Heines Grab gefunden.

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AU CIMETIÈRE DE MONTMARTRE

Au cimetière de Montmartre
Les cieux de l’hiver pleurent.
Et moi avec mes petites chaussures, je saute
Par-dessus les flaques, où nagent
Les saletés qui se défont doucement
Les crottes des chiens de Paris
Et j’ai les pieds trempés, quand
Je trouve la tombe d’Heine Henri.

Là, gèlent sous le marbre blanc,
Au fond de l’exil, ses ossements.
Avec lui, là, rêve Dame Mathilde
Et ainsi, il n’est pas seul à geler.
Mais elle ne s’appelle plus Mathilde
Dans la pierre, on lit gravé
Son grand nom, à lui, là, en grand,
Et dessous : Madame Heine, uniquement

Quand les Allemands à leur arrivée,
Ont planté leurs croix gammées
Sur la ville aux bords de la Seine,
Il les gêna ce nom d’Henri Heine !
Et moi je ne sais pas comment, mais je sais
Ceci seulement qu’ils l’ont effacé
Et qu’il fut réécrit
Par des Français dans la nuit.

Au cimetière de Montmartre
Les cieux de l’hiver pleurent.
Et moi avec mes petites chaussures, je saute
Par-dessus les flaques, où nagent
Les saletés qui se défont doucement
Les crottes des chiens de Paris
Et ainsi j’avais les pieds trempés, quand

J’ai trouvé la tombe d’Heine Henri.

(Traduction française de Marco Valdo)

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