La tradition veut que les papes soient inhumés dans les cryptes de la basilique Saint-Pierre de Rome, rebaptisées « Grottes vaticanes« , une suite de salles souterraines situées sous la nef de l’édifice.
Lors de ma dernière visite, la foule des pèlerins et des touristes n’y cherchait qu’une chose : la pierre tumulaire de Jean-Paul II (le corps du pape polonais a, depuis, été exhumé et se trouve aujourd’hui dans l’église proprement dite, près de la fameuse Pietà de Michel-Ange). En revanche, peu nombreux étaient ceux qui s’arrêtaient en face, devant le sarcophage de marbre gris bleu, encadré de deux anges, orné d’un chrisme et de son nom de règne en latin, sous lequel repose son prédécesseur, Jean-Paul 1er.
Pourtant, tous ceux qui sont en âge d’avoir vécu l’année 1978 et de s’en souvenir, n’ont pu oublier ce millésime fatal à deux souverains pontifes (on ne rappellera pas ici comment Coluche commentait ces événements…).
Paul VI, qui régnait depuis quinze ans, tout juste disparu, son successeur, le cardinal Albino Luciani innovait en se choisissant un nom de règne inédit pour un pape (cela ne s’était plus fait depuis le Xè siècle), par surcroît composé (du jamais vu depuis l’origine). À ce sujet, les commentateurs parlèrent sur le moment d’un hommage à ses deux prédécesseurs immédiats, Jean XXIII et Paul VI, avant qu’on ne rappelât que la mère du nouveau chef de l’église catholique travaillait à Venise en la basilique San Zanipolo (Saints Jean-et-Paul), là même où reposent les doges de la Sérénissime.
Or, trente-trois jours après son élection (qui, chose rare, avait été une formalité), ce jeune pape de soixante-cinq ans, que le public avait déjà adopté et surnommé le « Pape au sourire » (avant lui, Paul VI avait donné l’image d’un pontife compassé) succombait, selon la version officielle, à une crise cardiaque.
Depuis, bien des hypothèses ont circulé d’une mort qui n’aurait rien eu de naturelle (on parla, entre autres, d’empoisonnement). Il fut souligné que le défunt n’avait pas été autopsié. On sait que Jean-Paul 1er avait demandé l’ouverture d’une enquête sur des agissements dits suspects qui auraient été reprochés à la Banque du Vatican. Son Secrétaire d’Etat, le cardinal français Jean-Marie Villot, dont le nom revient dès qu’on évoque cette affaire, savait peut-être bien des choses mais il fut emporté par une pneumonie six mois plus tard…
Au matin du 28 septembre 1978, sur les ondes d’une célèbre radio, un journaliste fut à ce point décontenancé par ce décès subit qu’il commit exactement le même lapsus que son confrère Jacques Alba, en 1963, sur la même antenne !, au sujet de Jean XXIII, annonçant à des auditeurs stupéfaits, et répétant son erreur : Le Pope est mart ! Le Pope est mart!