Ils voient de la poésie dans ce que je fais. Non, j’applique ma méthode, c’est tout ! Ainsi s’exprimait Georges SEURAT (1859-1891), père du pointillisme qui laissa des tableaux aussi colorés que sa propre vie était terne.

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Authentique Parisien, né loin de tout sérail artistique, fils d’un original (son père, prénommé Antoine-Chrysostome, était un huissier manchot qui fortune faite s’était établi en misanthrope au Raincy qu’il ne quittait que le mardi soir pour rendre visite à sa famille et, suppose-t-on, s’acquitter du devoir conjugal) et d’une mère issue de la classe bourgeoise, il s’orienta tôt vers la peinture et ne vécut que pour elle, conservant en toutes circonstances une réserve, une pondération, un goût de la solitude qui constituaient l’essence de sa personnalité.

Après une brève formation classique aux Beaux-Arts, il poursuivit son apprentissage en autodidacte, fréquentant le Louvre pour y réaliser de nombreux croquis, et se passionna pour les recherches scientifiques sur la perception des images et les lois de la complémentarité des contrastes exposés par Michel-Eugène Chevreul (alors encore vivant puisqu’il mourut à 102 ans en 1889 et dont la tombe se trouve au cimetière de L’Haÿ-les-Roses). De ces travaux, il ressortait que l’oeil opère la synthèse des couleurs qui parviennent sur sa rétine sous forme de radiations lumineuses de longueurs d’ondes différentes. La révolution de Seurat fut d’utiliser les couleurs fondamentales en juxtaposant de petits points sur ses toiles plutôt que de mélanger les pigments sur sa palette.

En 1883, Une baignade à Asnières, refusé par le Salon fut exposé au Salon des Indépendants (dont il était un des membres fondateurs). Il faut se rendre à la National Gallery de Londres pour l’admirer.

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Il mit ensuite deux ans pour réaliser Un dimanche après-midi à l’île de la Grande-Jatte qui devait tant impressionner (Pissarro, entre autres, adopta cette technique qu’on nommait alors le « divisionnisme » agaçant ainsi Monet et Renoir qui n’y voyaient qu’un procédé mécanique) et faire de Seurat un chef de file.
La toile, monumentale, est exposée à l’Art Institute de Chicago (prêtée une seule et unique fois, en 1958, au MoMA de New York, elle faillit à cette occasion disparaître dans un incendie).

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Ultime oeuvre capitale, Le Cirque (visible au musée d’Orsay) est demeuré inachevé.

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Seurat travaillait à un grand tableau représentant une vue nocturne de la place Clichy quand un croup diphtérique (la maladie fut fatale à son jeune fils quelques jours plus tard) l’emporta le 29 mars 1891. Il avait trente-et-un ans.

On l’inhuma au Père-Lachaise, dans la 66è division, et si beaucoup de visiteurs entrés dans la nécropole par la porte des Amandiers passent devant la chapelle familiale (portant les initiales de son père, décédé deux mois après lui) en partie masquée par un arbre, peu la remarquent et très peu la fleurissent.

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Néanmoins, j’y avais relevé cet hommage il y a quelques années, preuve de la permanence de sa trace.

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