C’est aujourd’hui le centenaire de l’écrivain Jean Fougère (1914-2005), natif de Saint-Amand (Cher), que j’eus le privilège de bien connaître puisqu’il présida longtemps le jury des grands prix de l’Humour noir. Lauréat du prix Xavier-Forneret en 1966, il avait aussi obtenu le grand prix de la Société des Gens de Lettres en 1968, le grand prix de la Nouvelle de l’Académie française en 1972 et le prix des Quatre Jurys en 1976.
De cet homme délicieux et discret, je conserve le souvenir, sous son apparence flegmatique, d’une constante attention aux autres assortie d’un humour non exempt de grincements. Son recueil de nouvelles Visite, publié pendant l’Occupation lui avait valu d’être encouragé par Camus, Chardonne et Montherlant. Vinrent ensuite une dizaine de romans, d’autres nouvelles mais aussi un essai critique sur Thomas Mann salué par l’auteur de La Montagne magique en personne, ainsi que le très amusant Voulez-vous voyager avec moi ? (1957) avec photos de Cartier-Bresson et Doisneau. Les Passagers, roman volumineux paru en 1975, reçut des voix lors de l’attribution du Goncourt et aurait valu à Jean Fougère le Grand prix du roman de l’Académie française si ces messieurs, incapables de choisir entre le jeune Didier Decoin et lui, n’avaient décidé cette année-là de ne rien décerner du tout.
Le dernier mot à Antoine Blondin (cité par J. -R. Lambert) qui préfaça Le Faiseur d’or : Il était une fois un écrivain tellement doué que toutes les fées rêvées de la littérature saluèrent son avènement comme une félicité. On lui fit place et fêtes. Pour la première il n’était guère exigeant, mais les secondes ne l’ayant jamais pris de court, ce fut le plus naturellement et le plus gaiement du monde qu’il pénétra dans les lettres. Il devint presque célèbre sous le nom de Jean Fougère.
Il repose à Paris, au cimetière Montparnasse, auprès de sa chère Paule, pharmacienne mais aussi auteur, son épouse durant plus de soixante ans.
Ne l’oublions pas.