Nous ne serons pas nombreux à évoquer sa mémoire en ce jour anniversaire. André Theuriet… Qui pour se souvenir de cet écrivain (1833-1907) dont les romans, les poèmes et les contes ont vite sombré dans l’oubli ? Peut-être les nécrosophes qui lisent son nom au bas d’épitaphes lourdes comme des enclumes. Ainsi que dire de ce quatrain qui orne, au cimetière de Passy, la massive chapelle byzantine de Marie Bashkirtseff, la célèbre peintre et diariste russe (1858-1884) dont il fut le thuriféraire ardent (il édita la première version de son Journal, celle dont nous savons aujourd’hui combien elle fut expurgée par les mauvais soins de sa mère) :
Ô Marie, ô lys blanc, radieuse beauté
Ton être entier n’a pas sombré dans la nuit noire.
Ton esprit est vivant, vibrante est ta mémoire
Et l’immortel parfum de la fleur est resté.
Que de lourdeur pour celle qui se révèle (ses lecteurs me comprendront) infiniment subtile et complexe ! De même, c’est en sabots meusiens (sa région maternelle, bien qu’il soit natif de Marly-le-Roi) que Theuriet semble avoir rejoint son épouse au cimetière de Bourg-la-Reine où sa stèle, ornée d’un médaillon fixant ses traits, proclame au visiteur :
Qu’il joigne encore nos mains et rapproche nos fronts
Quand au fond du tombeau comme sur ces bruyères
Côte à côte étendus nous nous endormirons
Au chant des cloches mortuaires.
Et puissent dans le ciel nos âmes voyager
Comme les sons jumeaux de ces cloches paisibles
Qui s’en vont deux à deux avec le vent léger
Vers les étoiles invisibles.
Lorsqu’on apprend que c’est Paul Bourget qui le reçut à l’Académie française, on se console d’avoir souvent cru être né trop tard.