L’heure des fantasmagories
Où l’on peut avouer sans gêne
Que son héros favori
Se nomme Weidmann Eugene

C’est ce que chantait Jean Guidoni dans son spectacle Crime passionnel sur des musiques d’Astor Piazzola et des paroles de Pierre Philippe (comment un auteur tel que lui a-t-il pu rester si méconnu ?).

Le 17 juin 1939, à l’aube, on guillotinait à Versailles, l’allemand Weidmann, dit le « Monstre de la Voulzie », reconnu coupable de plusieurs meurtres, dont le physique jugé avantageux s’étalait en « une » des journaux depuis plusieurs semaines. L’exécution avait lieu en public, selon l’usage. Desfourneaux commandait la manoeuvre qui avait succédé à Deibler, mort en février, d’une attaque dans le métro.
La légende de l’extase nécrophile (Pierre Philippe, encore) des femmes débordant le service d’ordre pour venir tremper leur mouchoir dans le sang du condamné doit être considérée avec prudence. Il reste encore aujourd’hui des témoins oculaires de l’événement dont le comédien anglais Christopher Lee qui a raconté ce détail sordide. Toujours est-il que plus jamais ensuite on ne se servit de la guillotine en public, réservant son usage à l’intérieur des prisons.
Ce matin-là, on prit du retard. Il faisait déjà jour quand les battants de la prison s’ouvrirent sur les aides du bourreau encadrant le supplicié en chemise blanche. Quelques pas et le voici couché sur la planche, le cou dans la lunette. Sur ordre de l’exécuteur, le couperet s’abat, projetant la tête dans un panier et le corps basculant dans la malle d’osier. Si ces détails nous sont connus, c’est parce qu’un opérateur de cinéma s’était embusqué dans l’immeuble d’en face, immortalisant toute la scène. Ce film étonnant nous est parvenu et il faut le voir pour le croire : l’ensemble de l’opération ne dure que douze secondes.
Le corps d’Eugene Weidmann fut inhumé dans la plus grande discrétion au cimetière des Gonards de Versailles. Sa tombe, un simple rectangle de terre, s’y trouve encore.

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