Ce n’est certainement pas le plus intéressant cimetière de la capitale autrichienne mais je le mentionne ici à titre informatif afin d’en faire découvrir la plus illustre résidente et aussi au cas où certains d’entre vous viendriez à passer ou résider dans ce quartier excentré.
Aussi bien entretenu que tous les autres cimetières viennois, celui d’Atzgersdorf présente des alignements de stèles réparties dans des quadrilatères uniformes, au total plus de 3000 tombes sur une superficie de près de 4 hectares. Inauguré en 1881, en remplacement de champs de repos devenus trop exigus, il n’offre pas une large perspective historique.
Néanmoins s’y remarque, contre le mur du bâtiment central destiné à accueillir les familles lors des cérémonies, provenant d’un cimetière disparu, la remarquable stèle préservée d’Anna Lepper, décédée en 1825 à 22 ans, avec bas-relief montrant un ange en prière au chevet de la défunte.
Celle pour qui je suis allé découvrir ce cimetière vécut à peine davantage : l’écrivaine Hertha Kräftner (1928-1951).
Traumatisée par la fin de la guerre (son père fut blessé à mort par un soldat soviétique en 1945), elle entreprit d’enseigner l’allemand et l’anglais avant d’étudier aussi la philosophie (en particulier Kierkegaard et Sartre) et la psychologie. Habituée du Café Raimund et membre du cénacle réuni autour de Hans Weigel, elle commença de publier dans des revues tout en entreprenant une thèse sur les principes stylistiques surréalistes dans l’œuvre de Franz Kafka. Tourmentée, dépressive, elle vint à Paris en août 1950 connaître ce qui semble avoir été un des seuls moments heureux de son existence. En témoigne son Journal parisien (Pariser Tagebuch) paru en 1951 et salué par la critique.
Hantée par l’idée de mort, elle se suicida dans la nuit du 12 au 13 novembre 1951 en avalant une forte dose de Véronal.
Restent d’elle des poèmes où se perçoit l’influence de Rilke mais aussi de Paul Celan.
Redécouverte au tournant des années 80, elle inspire aujourd’hui des artistes tels le compositeur Stefan Heucke (né en 1959) qui a mis en musique plusieurs de ses poèmes ou le romancier Martin Kordić (né en 1983) qui l’évoque dans Jahre mit Martha.
Sa tombe se trouve près de l’entrée du cimetière.
On pourra profiter de la balade pour découvrir aussi les sépultures des personnalités suivantes :
Walter Behrens (1911-1999), peintre et illustrateur germano-autrichien.
Heidi Gutruf (1943-2003), comédienne.
Walter Richard Langer (1936-1995), animateur de radio et de télévision, spécialiste du jazz.
Karl Skraup (1898-1958), comédien (très populaire des années 30 à sa mort).
Leopold Vogl (1910-1991), joueur de football.
Franz Ziedler (1867-1917), homme politique.
Deux anges sur les tombes des familles Grübl et Kellner, ainsi que le jeune femme en pleurs sur celle de la famille Komarek, attireront les regards, moins toutefois que les impressionnantes aigles sculptées sur la base du Monument aux soldats tombés lors des deux guerres mondiales.
Enfin, on n’omettra pas le Mémorial aux victimes du nazisme, œuvre de Franz Pixner datée de 1954.
Adresse :
Reklewskigasse 25.